ORNELLA
L’histoire d’Ornella est celle d’une femme issue d’un monde où le regard de l’autre pèse lourd.
C’est celle d’une femme cassée qui ne sait plus se regarder.
Et qui monte sur scène pour se réparer.
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Ce projet suit Ornella Dussol, une jeune femme issue de la communauté gitane catalane de Montpellier.
Depuis 3 ans, je raconte l’histoire d’Ornella dans ce décor de théâtre qu’est la cité Gély. Un quartier dit « sensible », une sorte de « ghetto » coupé du reste de la ville, où les frontières se brouillent en permanence : l’ancienne église est un théâtre, la messe se déroule sous un chapiteau de cirque. L’espace privé déborde sur l’espace public. Les écrans sont rois. L’immense poulailler abrite une piscine l’été. Ornella est à l’image de ce paradoxe. Elle évolue en équilibre sur la vie, comme son ailleule Aimée sur un fil de funambule. Entre le monde gitan et le monde non-gitan. Entre l’enfance et l’âge adulte. Entre le stéréotype de la femme gitane et le rôle d’une femme qui veut prendre en main son destin. Entre la scène et le bitume.
Si les choses tendent à évoluer doucement, être une femme au sein de la communauté gitane est toujours aujourd’hui un frein important pour se réaliser. À plus de 30 ans, n’avoir ni mari ni enfants génère d’office une forme d’exclusion communautaire. Ornella dit souvent « ici, on vit pour le regard des autres ». Celui-ci pèse fort sur les épaules de celles qui représentent pourtant plus de la moitié de la communauté. En réalité, l’histoire d’Ornella rejoint celle des femmes d’aujourd’hui. Celles qui cherchent leur place en permanence dans un monde terriblement paradoxal, en pleine mutation. Entre diktat des réseaux sociaux, crise identitaire, poids du regard des autres et dissonance cognitive.